Baton Rouge: Les bars à Paris #7.

Les ouvertures de bars à cocktails se suivent et ne se ressemblent pas. Pour Baton Rouge, le nouveau venu à Pigalle, c'est Joseph Biolatto et Julien Escot qui s'y collent. Les mecs ne sont pas des néo-arrivants en demande de titre de séjour au pays des cocktails. Le premier a longtemps travaillé au Forum tandis que le second est le fondateur du légendaire Papa Doble à Montpellier. On frétille d'avance à l'idée de se rendre dans leur bar, les mecs sont parmi les plus respectés du cocktail français, on se dit qu'ils ont fait ça en grand, qu'ils ont investi des millions de dollars, qu'ils ont acheté des caisses de bourbon introuvable, qu'un urluberlu en haut de forme va nous faire des incantations mystiques et qu'on va manger du gumbo en sirotant un sazerac revisité. On espère que l'atmosphère sera moite, que les alligators seront affamés; le bayou n'est pas loin. On veut de la Louisiane!

 

baton rouge

 

Pourtant, il est prudent de rappeler qu'une ouverture de bar est toujours un moment délicat, entre les contingences financières et les délais à respecter, c'est souvent le parcours du combattant même quand les fondateurs ont des noms aussi prestigieux. On attend beaucoup mais on sait que la patience est de mise, qu'il faut souvent plusieurs semaines avant de trouver un rythme de croisière d'autant que les eaux du golfe du Mexique sont capricieuses et hantées par de terribles ouragans.

 

 

Une fois la porte franchie, on s'aperçoit très rapidement que pour la Louisiane c'est pas tout à fait ça. L'atmosphère est assez froide, le carrelage et les murs nus tranchent avec l'image bordélique que je me fais du pays Cajun. La déco inspirée des rites vaudous est bien sentie mais ça manque de chaleur et de bordel. Alors on se dit qu'on va être indulgents, que le bar vient d'ouvrir et que la déco va surement s'améliorer avec le temps. On passe au bar et on réclame la carte, l'accueil est très sympa, on a soif! Les cocktails sont, comme attendu, très orientés sur le bourbon et on retrouve beaucoup de classiques de la Nouvelle-Orléans revisités par les barmen. On tente un "Presidente à la Roosvelt" (bourbon, vermouth blanc, curaçao orange, grenadine), c'est bien fait, très bien équilibré et un vrai régal pour les amateurs de cocktails secs mais c'est pas d'une grande originalité. Pour l'originalité il vaut mieux partir sur le "lait de pélican" ( bourbon, liqueur de noix, sirop d'érable épicé, jaune d'oeuf, lait, noix de muscade), un cocktail super facile à boire qui en appelle un autre. On finit avec un "Million dollar Manhattan" (rye, vermouth maison, bitter suze), c'est un peu décevant, le vermouth maison manque de sucre et donne un côté vineux à l'ensemble; à 15€ le cocktail ça fout un peu les boules...On pense aux prix des cocktails et on se dit que tout est 2€ trop cher, les cocktails à 13€ sont élaborés avec des alcools d'entrée de gamme (bourbon Jim Beam pour le "lait de pélican"), ceux à 15€ n'utilisent pas de spiritueux premium mais des produits de milieu de gamme (bourbon Maker's Mark, rye Rittenhouse 100).

 

 

On ne vous cache pas notre  légère déception après avoir visité les lieux, on s'attendait à quelque chose de grandiose vu le pedigree des proprios. La déco manque de chaleur, les cocktails sont bons sans être extraordinaires et les prix sont excessifs. Heureusement, l'accueil est très sympa. On ne va pas non plus jeter le barman avec l'eau des glaçons et on laisse un peu de temps  à ces grands noms du bar pour améliorer leur nouvelle adresse. Allez y faire un tour, jugez en par vous même et peut être que vous découvrirez votre nouveau QG.

Baton Rouge
62 rue Notre Dame de Lorette, 75009 Paris
Ouvert du lundi au samedi, de 18h00 à 2h00

5 comments

  1. biolatto 23 février, 2015 at 15:33 Répondre

    Bonjour, je suis un peu décontenancé par votre article.
    En effet, nous n’avons peut être pas une déco finie mais nous y travaillons. Nous avons ouverts samedi pour trouver nos marques et faire découvrir notre travail aux personnes intéressées dont vous faites évidemment partie.
    Pour le vermouth nous en avons parlé ensemble et je tiens compte de votre remarque: le produit doit plaire au client; c’est une certitude.
    En revanche, je ne comprends pas en quoi notre politique tarifaire vous offusque de la sorte. Alcool entrée de gamme? Jim Beam Triple aged 6 ans pour un bourbon à la verse me semble déjà une bonne proposition.
    Maker’s Mark Rittenhouse 100, pas des produits premium?
    Il ne faut pas oublier que le prix des cocktails est calculé selon plusieurs critères: produits utilisés, charges salariales, loyers, électricité etc etc… Nous semble dans la moyenne des tarifs pratiqués dans le quartier.

    Au plaisir de vous recevoir lorsque la déco sera terminée.

    Cordialement

    • whiskyleaks 27 février, 2015 at 13:15 Répondre

      Bonjour,je peux comprendre que vous soyez décontenancé par mon papier. Il n’est, en effet, pas très complaisant mais je l’ai pourtant voulu nuancé. J’ai avant tout voulu dire que j’avais de grandes attentes et qu’elles n’ont pas été comblées. En ce qui concerne les prix j’ai une petite idée de vos charges mais vous êtes les seuls du quartier à proposer certains cocktails à 15€. Les prix dans les établissements voisins sont tous autour de 12/13€. Je ne comprends pas ce qui justifie ces 2€ supplémentaires car les spiritueux utilisés ne font pas partie des plus chers du marché. J’ai récemment bu un cocktail à 13€ à base de Monkey 47 (50€ les 50 cl) dans le quartier et l’utilisation de Rittenhouse 100 (34€ les 70 cl) ne justifie pas, selon moi, un prix plus élevé. Pour autant, j’ai conscience que l’ouverture d’un établissement est un moment délicat et je vous adresse, sincèrement, tous mes voeux de réussite.

  2. Biolatto 28 février, 2015 at 11:12 Répondre

    Comme vous le dites dans votre réponse, vous en attendiez peut être trop ? High expectations comme ils disent aux États-Unis d’Amérique.

    Nous n’avons pas le sentiment de voler les clients, encore moins de proposer des cocktails trop chers.

    Notre bar n’a pas été financé par un mécène multimillionnaire et pour ma part j’y ai consacré mes économies des 15 dernières années.

    Les bourbons sur le Back bar sont pour la plupart
    des pépites que je n’avais encore jamais vu ni goûté.
    Notre but n’est pas de faire le meilleur bar du monde. Mais juste un bar ou l’on se sente bien.
    Vous comme nous.

    Bonne continuation.

  3. Dierdorp Servé 2 mars, 2015 at 21:13 Répondre

    Joseph Biolatto est un excellent barman, un grand professionnel du Bar à Paris, il a prouvé son talent dans de nombreuses grandes maisons comme le Forvm Bar et il le fera encore. Puis Julien Escot je le connais moins, mais sachant qu’il est meilleur barman de France 2014 et ce que j’ai vu au salon Omnivore 2014, m’a convaincu de ses grandes qualités de barman. J’ai hâte d’y aller, et je vous en dirais plus et j’ai également hâte de voir le masterclass de Joseph au salon Omnivore 2015. Mettons en valeur les grands barmens français et respectons leur travail!

    • whiskyleaks 2 mars, 2015 at 22:17 Répondre

      La réputation de Joseph Biolatto n’est, en effet, plus à faire et je ne cesse de le rappeler dans cet article. Loin de moi l’idée de dénigrer son talent. Pour autant, j’attendais mieux de Baton Rouge et comme le dit d’ailleurs Joseph ma déception est peut être liée à mes hautes attentes. Mes principales remarques portaient d’ailleurs sur les prix. Pour ce qu’il en est de la carte des cocktails je n’ai pas été hyper emballé mais c’est un point de vue personnel ( le lait de pélican est cela dit excellent). Je vous invite évidement à aller faire un tour à Baton Rouge et à nous livrer vos impressions. Cheers!

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