Au printemps on a vu fleurir une multitude d'embouteillages en provenance de Fidji. Plutôt confidentiels il y a encore quelques années, ces rhums du Pacifique se sont fait une place de choix chez les embouteilleurs indépendants. Aujourd'hui on goûte les versions de Plantation, Transcontinental Rum Line, et Excellence Rhum, toutes produites chez South Pacific Distillery, la seule distillerie de l'archipel.
Jusqu'à cette année, les rhums fidjiens étaient un peu le parent pauvre de leurs cousins des Caraïbes. Berry Bros, Duncan Taylor et Compagnie des Indes en avaient bien proposé quelques versions mais les jus ne déclenchaient pas d’enthousiasme particulier. Tous les amateurs étaient bien trop occupés à se tripoter la nouille en pensant aux high esters jamaïcains. A tort ou à raison, Hampden a repris la main sur son stock et a mis un terme à ses collaborations avec les embouteilleurs indépendants. Ces derniers ont donc du partir vers de nouveaux horizons et proposer de nouvelles destinations. L'année dernière Transcontinental Rum Line avait marqué les esprits avec un excellent Fidji 2009, Plantation leur avait emboîté le pas avec le deuxième batch de sa collection extrême. Depuis, c'est une déferlante, les rhums fidjiens sont partout et on est forcé de constater qu'ils offrent un rapport qualité prix très avantageux.
Plantation Fidji 2009, 44,8%
On attaque avec le Plantation Fidji 2009 âgé de 9 ans. Embouteillé à 44,8%, c'est un assemblage de jus distillés en colonne et en pot still. Comme d'habitude chez Plantation, le bazar a d'abord vieilli 7 ans sur place avant de reposer 2 ans supplémentaires dans les fûts de Ferrand en France.
Au nez, on sent que le jus a reçu sa dose de bois sans que cela n'efface les belles notes de bananes et d'amande. Assez riche et bien gras il n'est pas sans rappeler le profil de certains jamaïcains légers en esters dans une version un poil plus gourmande. En bouche, on est sur un rhum qui fait parler les tropiques, noix de coco, vanille, caramel et gingembre font le job. On est sur un profil sec, quelque part entre les Guyana et les jamaïcains, d'ailleurs Plantation a assemblé ce rhum sans dosage. La finale est marquée par une légère acidité du genre bonbon et une petite fumée assez agréable. Dans l'ensemble c'est du très bon boulot, facile à boire sans tomber dans la simplicité, c'est à la fois riche, gourmand et assez fin.
Prix: 55€ dispo ici
Note : A
Transcontinental Rum Line, Fiji 2014, 48%
Après le succès de sa version 2009, la gamme lancée par LMDW remet le couvert avec ce Fiji âgé de 4 ans. Sur le papier ça fait plutôt flipper et on craint qu'un jus si jeune ne fasse office de puceau de service. Au nez, même si on sent la jeunesse, ce Fiji envoie bien la sauce. Marqué par les esters, il est du genre explosif ! Noix de coco, banane en arrière plan et un côté végétal le rendent terriblement séduisant. En bouche il se montre assez fougueux et encore une fois on pense aux rhums jamaïcains, c'est moins délicat que le Plantation mais son exubérance compense son manque de maturité. La finale est assez iodée et même s'il est moins huileux que son grand frère de chez Plantation il se montre assez long en bouche. Au final c'est une excellente surprise, on ne s'attendait pas à grand chose mais ce rhum plaira particulièrement aux fans d'esters jamaïcains. Moins docile et fondu que le Plantation, il nous présente l'autre visage d'une même distillerie.
Prix: 43€ dispo ici
Note: A
Excellence Rhum, Fidji 2004, 65,5%
A priori cet embouteillage ne joue pas dans la même catégorie que les deux précédents. Issu d'un fut unique, il est embouteillé au degré naturel et a été distillé en 2004. Au nez, on est sur un registre totalement différent, une fois passée la puissance de l'alcool on sent que le bois a fait le job. On retrouve un côté bourbon avec du caramel de la vanille et de la noix de coco le tout enrobé par des effluves de vieux meuble. Ici les esters sont plutôt discrets et on dit adieu à la banane qui est remplacée par de très légères notes d'ananas. En bouche et sans ajout d'eau c'est aussi subtil qu'un chassé de Booba dans les guibolles de Kaaris mais ça glisse plutôt bien étant donné le degré alcoolique. Encore une fois, ça n'a rien à voir avec les précédents, le jus est marqué par les notes de réglisse et de menthol tandis que le fruit se fait plus discret. La finale est aussi longue qu'une garde à vue de Benalla, elle fait causer le gros bois bien épais, les épices douces et le chocolat. Avec un peu d'eau on retrouve des notes d'agrumes très agréables qui n'effacent pas le caractère boisé du jus.
Prix: 130€ dispo ici
Note: A+
Ces 3 embouteillage sont tous très réussis mais présentent néanmoins des profils différents. le Plantation est le plus fin du lot, tandis que le TCRL est le plus exubérant. Enfin l'Excellence rhum est de loin le plus complexe même s'il aurait été encore meilleur avec un poil moins de bois. Pourtant il s'est montré relativement subtil étant donné sa puissance alcoolique, avec un peu d'eau il gagne en richesse. Au final, les rhums fidjiens méritent largement qu'on s'y intéresse. Avec leur profil sec, ils sont le substitut idéal aux rhums jamaïcains et offrent l'immense avantage d'être bien plus abordables en terme de prix.
