Boire est une activité qui se suffit à elle-même. Lire aussi. Cela dit, il arrive parfois – souvent ? – que l’on veuille agrémenter sa dipsomanie d’un peu de culture voire même qu’un roman nous donne envie de boire un alcool issu du monde qu'il décrit.
C’est le cas avec le rhum, alcool au pouvoir d’évocation sans limite. Quelques propositions de pairing donc pour passer de bons moments.
Hampden et Russel Banks
Russel Banks vit aux Etats-Unis mais a longtemps séjourné en Jamaïque, au point de faire de l'île un théâtre récurrent de ses romans. Grand connaisseur de la mystique locale et attentif aux structures sociales, Russel Banks est un passionné qui ne s'est jamais blasé d'être fasciné. Entre autres romans dans lesquels il transporte le lecteur au coeur de la Caraïbe Rasta, Le livre de la Jamaïque. Le narrateur part s'installer sur l'île pour étudier le mode de vie des Marrons, descendants d'esclaves installés dans les montagnes, et se retrouve à observer toute la vie depuis sa cabane, fumant de l'herbe, buvant du rhum. La belle vie en quelque sorte. Mais tout n'est pas aussi simple et sous l'apparente langueur de la vie locale, des tensions telluriques animent la société. Un livre génial, entre roman et essai où Russel Banks se livre sans retenue sur son rapport à la Jamaïque. Une plongée totale dans le délire local, des personnages inoubliables (mention spéciale à Terron Musgrave) et une description minutieuse des modes de vie et de la culture locale.
Alors certes, dans le roman, les types sont plus du genre à boire du rhum blanc dans des bouteilles en plastique que du Velier mais bon, il faut savoir vivre. On vous conseille donc de vous servir en accompagnement de la lecture un verre de Hampden 2010 de la gamme Habitation , un alcool certes raffiné mais dont la puissance et la concentration sont telles qu'il a su rester vrai. Spirituel et sauvage. Si vous n'en avez pas sous la main – ce qui reste assez probable – n'hésitez pas à vous jeter sur le Batch 2 du Worthy Park Transcontinental qui va bientôt sortir et qui déboite, pour un prix compétitif...
Clairin et James Ellroy
Le roman éponyme qui clôt la fabuleuse trilogie Underworld USA de James Ellroy se déroule pour partie en Haïti. Le Méchant Barbu a viré les casinos et les putes de La Havane, les Tiger Cabs tournent à vide et Sam Giancana ne sait plus où dépenser son argent sale. C'est ainsi que tout le beau monde qui peuple les deux premiers volumes (American Tabloid et American Death Trip) part en République Dominicaine pour monter des casinos, blanchir de l'argent et ouvrir des bars à putes. Mais de l'autre côté du fleuve Massacre, les Tontons Macoutes donnent de la machette et les têtes d'huile ne veulent surtout pas que Bébé Doc se fasse dessouder pour de sombres motifs humanitaires. Dwight Holly et Wayne Tedrow se retrouvent embarqués malgré eux dans ces embrouilles moites et vont tâter du vaudou sur l'île. Des scènes incroyables, une intrigue fleuve et un pan d'histoire, de la violence, des phrases inoubliables ("Et le mot camarade lui traversa la tête comme un hurlement"), bref un chef-d'oeuvre monumental.
Pour l'accompagner, pas d'autre solution que de téter du Clairin. Cet alcool de sorcier distillé dans des alambics rapiécés à partir d'une canne introuvable ailleurs et que Luca Gargano a ramené dans ses valises. Un truc aussi puissant que l'écriture de James Ellroy.
Foursquare et Graham Greene
Alors, oui, le fameux roman d'espionnage de Graham Greene se déroule à Cuba, mais on n'a pas voulu accompagner sa lecture d'un verre de Havana Club. Du coup, on se souvient que Graham Greene a beaucoup voyagé – notamment pour le Renseignement – et que la distillerie Foursquare correspond bien à l'esprit typiquement Anglais de l'auteur de Notre agent à La Havane. Pièce importante de la littérature d'espionnage, ce livre est d'une lecture absolument délicieuse. On est à Cuba, période Batista et un vendeur d'aspirateur se retrouve au cœur d'une intrigue internationale. Dans l'histoire du roman d'espionnage, ce livre tient une place centrale car il est l'illustration magnifique du principe littéraire qui sous-tend les plus grands romans et que Graham Greene résume en une phrase lumineuse : " Au siècle où nous vivons, la réalité n’est pas une chose à regarder en face."
Quoi de mieux donc que le Foursquare 2004, un de nos coups de coeur de l'année, pour accompagner ce roman génial ?
Bonne lecture donc et santé !
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