Chichibu The First (OB, 61,8% 2011) : Le Sens Pratique

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Chichibu the First

Apres Van Winkle, nous nous tournons vers une autre grande famille du monde des spiritueux ayant connu des déboires commerciaux avant de repartir de plus belle. Comme ce fut souvent le cas dans l’histoire du whisky Ecossais, la construction de Chichibu, la derniere née des distilleries Japonaises, est à mettre au crédit d’un entrepreneur aventureux. Ichiro Akuto appartient à une illustre famille de maitres distillateurs de saké et lorsque Hanyu, la distillerie familiale, fit faillite et fut démantelée au début des années 2000, il se mit en quête d’un lieu idéal pour repartir à zéro. Grace a la vente du whisky issu des derniers futs produits à Hanyu, Ichiro put acquérir un terrain à Chichibu, au pied des Alples japonaises, un site qui semblait offrir des conditions climatiques optimales pour la production et le vieillissement du whisky.

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Ichiro et ses enfants

La distillerie commença à produire son jus en 2008 en utilisant des méthodes traditionnelles. Pour ne pas perdre la main et perfectionner sans cesse ses techniques de production, l’équipe de Chichibu effectue chaque année un voyage de formation en Ecosse, une sorte de pèlerinage technico-spirituel qui n’est pas sans rappeler le voyage initiatique que Taketsuru effectua dans le Speyside en 1919. De là à y voir la reconstitution symbolique de l’acte fondateur du whisky japonais, il n’y a qu’un pas que nous n’hésiterons pas à franchir.

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Ichiro s'adonnant au maltage traditionnel

Si Yoichi, avec ses alambics chauffés au charbon, se veut la distillerie japonaise la plus traditionnelle, Ichiro Akuto semble quant à lui chercher à produire le whisky le plus pur en prêtant une attention particulière aux moindres détails : le chêne japonais mizunara utilisé pour les washbacks (cuves de fermentation), l’orge maltée au sol dans la distillerie, le choix des futs pour le vieillissement ainsi que des variétés du grain pour le whisky. C’est vers une véritable école théorique de la pratique de la distillation que tend Chichibu, ce qui ne pourrait que ravir le regretté Pierre Bourdieu. L’attitude radicale de cette distillerie éprouvette semble fonctionner auprès de la frange dure des amateurs de single malt qui ont plébiscité les premiers embouteillages de Chichibu, et ce malgré leur jeune âge : the first, the floor malted, the peated, et le tout nouveau Chibidaru ont tous été reconnus comme de francs succès.

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Les washbacks en Mizunara

Nous goutons aujourd’hui le tout premier whisky Chichibu, produit en 2008 et embouteillé en 2011 a 61,8%, un nectar historique donc et qui ne saurait nous laisser de marbre.

Œil : Doré léger

Nez : Fruité et floral : vanille de Madagascar (on dit que c’est la meilleure) et roses jaunes, pommes Fuji, jus de raisin, melon vert et sucre de canne. Le fort degré d’alcool se fait sentir mais le nez reste parfumé sans jamais trop en faire. Le genre de whisky que l’on se surprend à sniffer pendant dix minutes avant d’y tremper les lèvres.

Bouche : Sucré et puissant au premier abord, les pommes sont toujours là, des notes gâteaux qui ne sont pas sans rappeler un bon vieux baba au rhum. Les notes de vanille et chocolat qui semblent compléter ce tour d’horizon pâtissier se marient a merveille avec l’aspect crémeux du distillat. Avec quelques gouttes d’eau ce jeune whisky tend à s’ouvrir alors que les notes sucrées et suaves s’accentuent, il semble gagner une dimension. Vin blanc et champagne. On perçoit un peu plus nettement les notes boisées (des barils de bourbon provenant de la distillerie Heaven Hill), poires, et une vanille qui semble plus compacte.

Finale : Si l’ensemble reste sucré, la finale plutôt longue tend plus vers le végétal, artichaut ( ?), puis fleurs des champs, algues, melon vert et pastèque. C’est impressionnant pour un whisky aussi jeune.

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Ichiro devant sa distillerie

Il y a de cela un mois j’avais eu l’occasion de tester l’expression « the floor malted » au Septime, un restaurant-éprouvette parisien. Elle m’avait semblé un peu plus complexe et fruitée que « the first ». Quoi qu’il en soit, on en sort de l’expérience Chichibu quelque peu bluffé, tout cela est exceptionnellement maitrisé et complexe pour un whisky aussi jeune. Cela reste un peu trop cher pour notre modeste bourse, mais en soutenant cette distillerie indépendante et ultra-prometteuse on fait un véritable pari sur l’avenir. Il va falloir garder un œil sur Chichibu qui, comme Kichoman sur Islay, risque de devenir une véritable référence lorsqu’elle sera à même de proposer des whiskies plus âgés. Achetez du Chichibu aujourd’hui, il y a fort a parier que vos enfants vous en seront gré dans vingt ans.

Note : BBB (Seijun Suzuki)

Prix : 130 euros (Bourgeoisie Eprouvette)

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