Bowmore 1965 13 ans (45.7%, Cadenhead 1978): Dumpy Conqueror!

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Avant de passer sous le contrôle de Springbank et d'étre rapatrié à Campbeltown dans les années 1980, l'embouteilleur indépendant Cadenhead était établi depuis 1842 à Aberdeen, sur la cote Est des Highlands. La firme rencontra de sérieuses difficultés dans les années 1960, à tel point qu'elle fut contrainte de vendre une bonne partie de ses stocks aux enchères en 1972, mais ne se fit pourtant pas prier pour conserver quantité de formidables whiskies qui furent embouteillés par ses soins à la fin des années 70. A l'époque, le jus qui sortait des chais de Cadenhead était vendu dans des bouteilles appelées "Dumpy", un nom qui faisait référence à leur forme ramassée. Malgré le manque d'élégance de leur contenant, ces whiskies, distillés pour la plupart pendant l'age d'or des années 60, sont aujourd'hui particulièrement prisés par les amateurs.

 

Lorsque l'on interroge les spécialistes, les vieux Bowmore (ceux des années 60 comme le Black Bowmore) sont souvent cités parmi leurs whiskies préférés. Si la distillerie s'est récemment remise en selle à coups de Bowmore Devil's Cask et de Mizunara Finish le whisky qu'elle produit n'a plus grand chose à voir avec son merveilleux ancêtre. La faute sans doute aux changements de méthodes de production intervenus dans les années 80 ainsi qu'à la piètre qualité des futs utilisés de nos jours. 

 

Pour remonter le temps et nous assurer de la véracité des propos des anciens nous avons donc gouté un Bowmore 1965 Cadenhead Dumpy à Auld Alliance, le bar-musée du whisky de Singapour. Autant vous dire tout de suite que le jus, pourtant seulement âgé de 13 ans, n'a absolument rien a voir avec le Bowmore 12 ans d'aujourd'hui (nous avons comparé). Boire un whisky pareil remet pas mal d'idées reçues en place et l'on prend conscience du chemin parcouru à l'envers par l'industrie du whisky lors des 50 dernières années. C'est une véritable explosion de saveurs à laquelle on a du mal à ne pas songer longtemps après avoir avalé la dernière goute du fameux nectar. Et l'on en vient à penser, par association d'idées, aux "Duppies" esprits des morts qui n'ont pu rejoindre l’au-delà et hantent les nuits des vivants dans la culture populaire caribéenne. Un whisky fantôme qui n'est pas sans rappeler le chef d’œuvre de Bob Marley and the Wailers mis en musique par le génie Lee Perry: "Duppy Conquerer."

 

“Yes me friend, me friend

We deh 'pon street again

Yes me friend, me good friend

Dem set me free again

The bars could not hold me

Force could not control me

They tried to keep me down

But Jah put I around”

 

Passons aux choses sérieuses et goutons ce spectre éthylique...

 

Œil : Cuivré

 

Nez : Rempli de fruits ultra-murs avec cette tourbe unique qui s’est comme cristallisée dans le fruit : transsubstantiation ! Il y a un max : melon, fruits des bois, mangue qui virent vers le pneu et l’iode. Belle concentration aromatique. Un coté presque acre de caoutchouc et de gomme, hévéa de Malacca : le pneu façon belle époque ! Cela pique un peu : oranges confites, caramel brulé, eucalyptus et menthol. Yes me friend, me good friend!

 

Bouche : Attaque avec beaucoup de fruits tropicaux ultra-murs, comme une version concentrée des Bushmills tourbés (1991) que l’on a vu récemment. Sucré au début, coulis de fruits mais tend rapidement vers l’amer, le stade oral, l’appel de la tétine… Reprenons nos esprits : écorces d’orange et pamplemousse, toffees, beurre, et caramel brulé. La tourbe apparaît vers la fin dans une version confite ou fossilisée, c’est selon, impressions marines, cendres, algues et grande minéralité. Sur la fin ce sont plutôt les hydrocarbures qui prennent le dessus. Essence et huile de moteur. Ça commence a faire pas mal de choses…

 

Finale : Longue et très minérale. Sur l’huile de moteur et la réglisse.

 

Prix: ? (King of Kings, Lord of Lords, Conquering Lion of the Tribe of Judas)

 

Note : AAA (Lee Scratch Perry)

 

En bonus le vrai "Duppy Conqueror"...

 

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