Malgré ce que veulent bien en dire les magazines, la période des vacances est moins propice à lire qu'à boire. Mais nos corps, durement mis à l'épreuve par les libations en cascade nous envoient parfois des stimuli pour nous convaincre de lever le pied – un peu. Faut-il pour autant reprendre le travail ou se mettre au sport ? Non, quand on ne peut pas boire, il suffit de lire des livres où d'autres le font pour vous. Petite sélection donc, des meilleurs romans pour boire par procuration ou susceptibles de vous faire passer l'envie d'abuser.
1) James Lee Burke Prisonniers du ciel
Deuxième volet de la série culte des aventures de Dave Robicheaux, Prisonniers du ciel est la porte d'entrée idéale pour découvrir l'univers de James Lee Burke. Originaire de Louisiane, cet auteur de roman noir est porté par un sens aigu du paysage et une sensibilité en constant contraste avec la violence de l'univers qu'il décrit. Son personnage, Dave Robicheaux, ancien flic du NOPD – comprenez la Police de la Nouvelle Orléans — a quitté ses fonctions pour arrêter de boire et s'éloigner de ses démons. Mais, on ne se cache pas longtemps dans les eaux moites du bayou et le passé resurgit, des profondeurs boueuses de la psyché de ce héros inoubliable.
Qu'est-ce qu'on boit avec ?
Un Jim Beam et une bière Hatuey glacée – ou de la Budweiser plus facile à trouver.
2) Malcolm Lowry Au dessous du volcan
Livre culte, monument de symbolisme, on ne présente plus le roman de Malcolm Lowry. Les errances du Consul dans les cantinas de Quauhnahuac laissent au lecteur des images d'une force rare et presque un goût d'alcool dans la bouche. Le Consul se meurt, hanté par ses névroses et incapable de faire autre chose que boire en attendant Yvonne. Le tour de force de Lowry – outre d'avoir rendu le prénom Yvonne poétique – est d'être parvenu à rendre l'inquiétude et le trouble alcoolique aussi palpables. Michel Foucault recommande. L'été c'est aussi le moment de se confronter à des chef-d'oeuvres qui nécessitent du temps et de la concentration. Et puis, c'est aussi très utile pour décrocher un peu du bar, une lecture attentive de Malcolm Lowry serait apte à calmer Serge Gainsbourg en visite à La Jonquera.
Qu'est-ce qu'on boit avec ?
Du Mezcal évidemment mais si possible du bon
3) Mathias Enard L'alcool et la nostalgie
"Tu es un faux frère, Vladimir, tu ne bois pas [...]"
Un roman qui débute comme ça... Mais toute l'oeuvre de Mathias Énard pourrait figurer dans ce petit guide de vacances tant cet auteur sait de quoi il parle quand il est question d'alcool. Avant tout connu pour Zone, un roman inoubliable à ranger dans les classique-moderne, fresque haletante écrite d'une seule phrase qui s'étend comme les rails des 517 kilomètres qui séparent Milan de Rome, Mathias Enard construit peu à peu une oeuvre aussi sombre parfois que lumineuse souvent. A l'écoute du monde, il situe ses récits dans des théâtres symboliques où les personnages boivent souvent et beaucoup. Le romantisme désespéré et la prose puissante de L'alcool et la nostalgie en font le viatique idéal pour s'extraire des plages paradisiaques sur lesquelles on cuve sa cuite. Ce voyage en Transsibérien vers les souvenirs d'une amitié exaltée est un monument de poésie et de concision qui laisse un souvenir impérissable, Vladimir, Jeanne et Mathias aussi.
Qu'est-ce qu'on boit avec ?
De la vodka évidemment. Et comme on n'a plus vingt ans on mérite un peu mieux que de la Smirnoff : Belvedere.
4) Jack Kerouac, Big Sur
Pourtant mais c'est Big Sur ! Ce roman n'est pas le plus connu et peut-être pas le meilleur de Jack Kerouac mais il est tout indiqué pour la tâche qui nous occupe : trouver des livres dans lesquels les personnages ont avec l'alcool une relation qui prenne le relais de la notre. Et pour le coup, c'est vraiment le récit ad hoc. Pendant idéal à Sur la route, Big Sur met en scène les personnages récurrents de l'oeuvre de Kerouac dans ce lieu cher à Henri Miller et sorte de Bretagne américaine – les chapeaux ronds en moins. Le narrateur y débarque pour arrêter de boire et trouver un peu de solitude mais rapidement, ce beau projet de retraite monacale se heurte aux vieux démons de Kerouac et la vie sociale reprend le tour d'enfer qu'elle a parfois dans son oeuvre. Un livre désespéré mais magnifique.
Qu'est-ce qu'on boit avec ?
A peu près de tout, même du Porto Blanc – si si !
5) Steeve Tesich, Karoo
Encore une trouvaille géniale des éditions Monsieur Toussaint Louverture, Karoo est un roman dont l'argument vaut à lui seul un détour. Ecoutez plutôt : Saul Karoo, scénariste chargé de corriger les films et les scénarios par des producteurs mal intentionnés, est subitement frappé d'un mal terrible. Il ne parvient plus à être saoul ! La découverte de cette mithridatisation à la tisane le plonge dans des abîmes d'introspection. Son personnage social est entièrement construit autour de l'addiction qu'on lui prête et il ne se sent pas de décevoir ses amis en n'étant plus jamais bourré. Il continue donc à boire, obligé de feindre l'ivresse, mais la lucidité persistante que lui confère son mal change peu à peu son regard sur la vie. Au point de sauver ce cynique désespéré ? Réponse au bout d'une quantité phénoménale de picole et de quelques 600 pages. Un des grands romans de cette année.
Qu'est-ce qu'on boit avec ?
Les cocktails – mais en grande quantité – semblent parfaits pour se plonger dans l'ambiance décadente de Hollywood. Quelques recettes faciles ici.
Bien sûr, si vous travaillez, il vaut mieux continuer à boire, vous lirez au mois d'août. Pour les "juilletistes" qui ne seraient pas parvenus à étancher leur soif de lecture et dans le but de satisfaire l'industrie hôtelière rassurez-vous, nous publierons un liste pour les "aoûtiens".
Mais que buvait -vraiment - Ernest Hemingway ?
Glenmorangie Allta, la levure avant les fûts
Habitation Velier : le prix de la transparence.
Avec D.U.C. Booba invente le LOL whisky
Avec D.U.C. Booba invente le LOL whisky